“Hi hi hi, je vois que t’es un connaisseur toi !”. Derrière ce genre de propos malvenus, on sait tous plus ou moins ce qu’il y a derrière sans même évoquer la teneur du sujet. Le même phénomène se produit dans ce gag de Lafesse intitulé “La gare de Monaco” avec la proposition “la mienne est plus grosse que la votre”.
Vous ne serez donc pas étonné d’apprendre qu’en japonais, on trouve également ces mêmes allusions. C’est ce que nous allons voir aujourd’hui avec 通 (tsû) qui a vu heureusement son sens bien évoluer.
Origine du mot tsû et usage aujourd’hui
通 est un kanji très employé donc polysémique mais avec lequel on retrouve quand même une idée commune. C’est celle d’un chemin pouvant être physique (mot 通り toori signifiant “rue/avenue”) ou invisible (mot 通信 tsûshin “chemin du message = communication”) reliant plusieurs points. Lors de la communication justement, le message passe en général par plusieurs voies qui peuvent être verbales et non verbales. Et lorsque celui-ci arrive à destination sans être trop altéré, on se comprend alors ce qui est une des significations du verbe 通じる (tsûjiru). 彼には冗談が通じない (kare ni ha jôdan ga tsûjinai) : il ne comprend pas la plaisanterie (message qui ne passe pas).
Ce serait à partir de cette logique d’informations qui circulent que vers le milieu de l’époque d’Edo (1603-1868), 通 (tsû) a pris le sens de “qui s’y connaît bien” et plus particulièrement “sur le cœur humain”. Car cela visait surtout les hommes qui avaient l’habitude d’aller dans des 遊廓 (yûkaku “bordel reconnu”) et qui donc finissaient par devenir des experts dans le domaine. On les appelait ainsi les 通人 (tsûjin) sans que ce soit péjoratif. Car à l’époque au Japon , fréquenter les bordels était plutôt l’apanage des gens riches et distingués qui étaient respectés.

Cela explique pourquoi aujourd’hui encore, tsû s’emploie surtout pour des personnes qui s’y connaissent dans un domaine jugé raffiné. Par exemple 寿司の通 ou 寿司通 (sushi no tsû/sushitsû) renvoie au connaisseur de sushis. On peut citer aussi le théâtre, le sumo, la peinture… Disons que c’est la version un peu plus pédante de オタク (otaku) qui n’est pas forcément péjoratif non plus (au Japon du moins) mais qui renvoie tout de même à l’image d’un individu un peu trop absorbé dans son domaine de prédilection.
Sources : fleapedia (informations diverses), Kotobank (dictionnaires et encyclopédies)