La presse occidentale a commencé a relaté depuis l’année 2011 un phénomène apparemment typique au Japon : le succès des yaeba (八重歯). Littéralement “multicouches de dents”, cela fait surtout références aux canines proéminentes qui partent de travers. S’agissant à l’origine d’une malformation naturelle, c’est en particulier la pratique d’en poser artificiellement qui a dérangé. Comment expliquer que celle-ci ait pu émerger ?
Analyse du mot yaeba et petit aperçu des soins dentaires au Japon
Yaeba s’écrit en kanji 八重歯 où yae 八重 signifie “huit couches” et ha 歯 “dents”. Comme on l’avait vu notamment avec le mot yaoya (八百屋), le kanji 八 peut signifier “plusieurs/beaucoup”. Cela donne ainsi littéralement “plusieurs couches de dents“, conséquence d’un mauvais alignement. En général, c’est soit que la bouche est trop petite, soit que les dents de lait ne sont pas tombées assez tôt. Dans tous les cas, ce chevauchement de dents permet une visibilité accrue des canines, ce qui donne un côté enfantin. Et c’est souvent l’image qu’on retient à la fin.
Au Japon, avoir des yaeba n’est pas quelque chose de très rare : selon une enquête de 2015 (1345 participants, 20-69 ans), 12,5% des interrogés sont concernés. Par ailleurs, lorsqu’on demande aux hommes japonais ce qu’ils en pensent, 38,8% trouvent cela suteki (素敵 “ravissant”). Bien qu’ils soient minoritaires, ils sont loin d’être marginaux ! A l’inverse, seules 19,4% des femmes apprécient lorsque c’est avec un homme. D’une manière générale, il faut savoir que la pratique d’aligner ses dents n’est pas encore très répandue au Japon. On atteint en effet péniblement 21,3% (pour ceux qui en ont besoin) contre 50% pour les USA. Et si on leur demande s’ils veulent procéder à des soins, ils ne sont que 54% (contre 80% pour les USA).
On peut donc dire qu’avoir des dents parfaitement alignées ne semble pas être la priorité des japonais. Pour information, à moins qu’il y ait un risque évident sur la santé, les soins de ce type ne sont pas remboursés par la sécu (seulement une partie en France). Donc même pour un enfant, il faut compter en moyenne 1 000 000 de yen soit environ 7000-8000 euros ! Autant dire que c’est un paramètre important avant de penser à se faire soigner ses yaeba.
Sources : news.mynavi (comparaison avec les USA), sirabee.com (enquête de 2015)
L’émergence et la popularité du tsuke-yaeba
Etant donné que l’alignement des dents n’a jamais été une pratique répandue au Japon, il n’est pas non plus rare de voir des personnalités célèbres en avoir. C’est le cas en particulier d’idoles telles que Mika Nakashima ou encore Ayumi Hamazaki. Ces jeunes femmes sont loin d’être moches et c’est probablement d’elles qu’une nouvelle mode est apparue : le tsuke-yaeba (つけ八重歯). Littéralement “se faire poser/fixer des yaeba“.
En cherchant sur le net japonais, on trouve effectivement des dentistes qui se proposent ce service moyennant en général 150€ par dents. Il existe différentes techniques mais comme son nom l’indique, cela consiste normalement en un implant temporaire ou quasi-définitif. Voici des photos avant-après que propose la clinique Takeyama (département de Saitama) :
J’avoue personnellement avoir été surpris qu’un dentiste fasse la pub de ce genre de pratique qui est tout le contraire d’un soin. Selon un sondage réalisé par un dentiste auprès de ses collègues sur Facebook (ça vaut ce que ça vaut !), ils sont une écrasante majorité (88,6%) à refuser le tsuke-yaeba. Il serait donc exagéré d’affirmer qu’on peut le faire n’importe quand et n’importe où ! De plus, les mineurs (moins de 20 ans au Japon) doivent être accompagnés. Dernier chiffre avant de se quitter : selon une enquête de 2012 réalisée sur le net, seules 6% des femmes japonaises disent être tentées par un tsuke-yaeba. Et vous ? 😀
Sources : ha-channel-88 (sondage réalisé sur fb), minna no koe (sondage de 2012)
Une réponse
J’ai toujours trouvé ça super cute haha