Quand un humain se tient debout, il se trouve normalement dans une position verticale. Il n’y a que dans une situation telle que “tiens, t’es encore debout ???” que l’adverbe “debout” peut décrire quelqu’un d’avachi devant son ordinateur à regarder des séries. En japonais, le verbe 立つ (tatsu) que l’on emploie le plus souvent pour décrire une personne qui est sur ses pieds. Nous allons voir cependant que celui-ci est très loin de se limiter à ça !
Origine du kanji 立 de 立つ
Je vais être honnête avec vous : si j’ai choisi de vous parler de 立つ aujourd’hui, c’est pour le kanji 立. On peut effectivement le catégoriser comme un 指事文字 (shiji moji) et je n’avais pas eu l’occasion jusqu’à maintenant de vous en présenter un. Je précise tout de suite comme l’évoque cet article qu’il y a débat sur sa catégorie étymologique. Certaines références le considérant comme un 会意文字 (kaii moji) et certaines prétendent même que c’est un 象形文字 (shôkei moji). Oui, c’est compliqué !
J’ai donc choisi quand même l’interprétation du Shin-Kangorin (dictionnaire étymologique de kanji) qui nous présente ces illustrations :

On a ainsi de gauche à droite le style d’écriture ossécaille (甲骨文 kôkotsubun) qui est le plus ancien suivi du style bronze (金文 kinbun) et de celui sigillaire (篆文 tenbun). Ici, tout le monde s’accorde pour dire qu’on distingue un humain debout. C’est au niveau de l’interprétation de l’importance du trait horizontal du dessous (一) qu’il y a des désaccords.
Shiji moji, kaii moji ou shôkei moji alors ?
Pour les spécialistes qui considèrent que 立 est un shiji-moji, le 一 correspond simplement d’un “trait positionnel“. Celui-ci permet d’indiquer que l’individu se tient debout au-dessus de quelque chose. Un peu comme avec le kanji 上 (“au-dessus/sur”) dans lequel le trait horizontal ne sert que d’indicateur. Dans le cas de 立, si on retire ce trait, on pourrait croire que l’humain est plutôt représenté dans une position allongée. C’est donc pour lever cette ambiguïté qu’il est présent.
Ceux qui pensent que 立 est un kaii-moji (combinaison de plusieurs sens pour rappel) insistent sur le fait que 一 correspond au sol (地面 jimen en japonais). C’est ce qui est écrit dans le Kanjigen avec l’interprétation “individu” (大) + “sol” (一) = “debout”.
Enfin, pour les partisans du shôkei-moji (pictogramme), je n’ai pas trouvé d’info concrète. Mais pour arriver à cette conclusion, il faut s’accorder sur le fait qu’il s’agit de la représentation graphique d’un objet concret. Et comme 立 traduit plutôt un état/une action, ça me semble un peu farfelu !

Significations du verbe tatsu
On en vient maintenant au japonais si vous le voulez bien. Il se trouve que le verbe 立つ (tatsu) existait déjà avant l’introduction du kanji 立 au Japon. Et s’il est vrai que les premiers écrits (début du VIIIe siècle) évoquaient déjà l’idée d’une personne debout, ce n’était pas forcément la signification qui dominait. Le Nihon Kokugo Daijiten liste en effet en premier la définition générale “物、人などが、目立った運動を起こす。”. Traduction : “quand une chose ou encore une personne effectue un mouvement qui se remarque/qui est bien visible”.
Encore aujourd’hui, on trouve des expressions comme 波が立つ (nami ga tatsu) “des vagues se forment”, 泡が立つ (awa ga tatsu) “des bulles apparaissent”, 風が立つ (kaze ga tatsu) “le vent se lève”… Ainsi, 立つ décrit souvent une mise en action avec le passage vers un état plus facilement perceptible. J’aime bien personnellement l’expression うわさが立つ (uwasa ga tatsu) “des rumeurs se répandent”.
Il serait vain toutefois de vous lister tous les usages possibles de ce verbe tant ils sont variés. Je vais donc me concentrer sur le plus concret : se mettre debout/se tenir debout/se dresser. On peut distinguer ici deux types d’usage :
- L’usage adverbial 立って (tatte) qui peut être traduit par “debout”. バーガーを立って食べる (bâgâ wo tatte taberu) “manger un burger debout”. Pour que ce soit encore plus concret, vous pouvez utiliser l’expression 立ったまま (tatta mama).
- L’usage verbal “classique”, c’est-à-dire l’action consistant à se mettre debout. 立ちなさい (tachinasai) : “lève-toi !”. 後ろ脚で立つ犬 (ushiroashi de tatsu inu) : “Un chien qui se dresse sur ses pattes de derrière.”


