Les 会意文字 kaii moji (« idéogrammes composés » ou « idéogrammes associatifs »), combinent deux ou plusieurs composants à valeur sémantique. 会意 (kaii) signifie en effet “association de sens”. On peut dire qu’ils sont plus “ambitieux” que les 指事文字 (shiji moji) puisque chaque élément possède un sens propre. Et contrairement aux 形声文字 (keisei moji), ils ne reposent pas sur un composant phonétique.
Avec cette combinaison de plusieurs sens, on peut alors créer aussi bien des notions concrètes qu’abstraites (arbre + arbre = forêt, arbre + individu = repos…). Sur les 2136 jôyô kanji (kanji usuels), approximativement 24% feraient partie de la catégorie étymologique kaii moji.
Exemples typiques de 会意文字
Voici quelques exemples courants de kaii moji, avec leurs composants et leur signification :
| Caractère | Composition | Interprétation |
|---|---|---|
| 休 | 人 + 木 | personne adossée à un arbre = repos (voir yasumu) |
| 森 | 木 + 木 + 木 | un nombre élevé d’arbres = forêt (voir mori) |
| 明 | 日 + 月 | soleil + lune = lumineux/brillant |
| 男 | 田 + 力 | force dans le champ = homme (héhé !) |
| 信 | 亻+ 言 | la parole d’un individu = confiance (on dit bien “tu as ma parole” en français, cqfd !) |
| 島 | 山 + 上 + 下 | montagne entre le haut et le bas = île |
kaii moji ou keisei moji ?
Comme précisé en introduction, il n’y a en principe pas de composant phonétique à proprement parlé dans un kaii moji. Problème : difficile d’établir avec certitude si un composant est avant tout sémantique ou avant tout phonétique. Il n’est donc pas rare que certains caractères soient placés à la fois dans la catégorie 会意 (kaii) et 形声 (keisei) en fonction des interprétations des spécialistes.
En plus de ça, il existe une catégorie à part plus ou moins contestée : 会意形声文字 (kaii keisei moji). En gros, cela renvoie à un sinogramme qui possède un composant sémantique et un autre phono-sémantique. Exemple cité dans l’article Wikipédia : 清. Traditionnellement, il est décrit comme un keisei moji : radical 氵 (« eau ») + composant phonétique 青 (prononcé sei). Sa signification est “pur” et on comprend que cela a un lien avec l’eau.
Toutefois, certains ont proposé que 青 ne servirait pas seulement de “label phonétique”, mais aurait aussi un lien sémantique historique impliquant une ancienne racine chinoise signifiant “clair”. Ainsi, “eau claire” donnerait “pur”. Partant de ce principe, on est alors tenté de placer tous les idéogrammes complexes dans cette catégorie “fourre-tout”. Il suffit effectivement d’un peu d’imagination pour trouver du sens à n’importe quel composant phonétique.
Pour info, les sinologues contemporains à l’instar de Qiu Xigui (qui nous a quitté récemment) estiment qu’une majorité de caractères chinois sont de type keisei (composant sémantique + composant phonétique donc). Je suis pour ma part plutôt convaincu par cette théorie et je vous invite à lire cet article si vous maîtrisez le japonais.