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La série de manuels Marugoto a vu le jour en juin 2014 et va pour le moment du niveau A1 au niveau B1. Elle se différencie des deux autres méthodes que j’ai présentées précédemment (40 leçons pour parler japonais et Parlons japonais A1) sur plusieurs points :
- Elle n’est pas pensée à l’origine pour un public francophone. Vous trouverez tout de même la liste des mots et expressions japonaises traduites en français en vous rendant sur leur site officiel marugoto.org (inscription gratuite). Le manuel contient de l’anglais notamment pour la traduction des énoncés mais on verra que l’absence d’explications grammaticales fait que finalement, on peut dire qu’il tente de viser “tout public adulte souhaitant apprendre le japonais”.
- Elle propose deux manuels différents par niveau : le Rikai (qui vient du japonais 理解 “comprendre”) et le Katsudoo (qui vient du japonais 活動 “activités”). Les auteurs expliquent que le premier a pour objectif “l’étude des éléments de la langue japonaise qui sont nécessaires pour la communication” tandis que le second vise “l’acquisition de capacités pratiques à communiquer dans des situations quotidiennes”. Cela tourne à chaque fois autour de la communication et les auteurs précisent qu’on peut utiliser conjointement les deux vu qu’ils traitent des mêmes sujets.
- Il est possible d’accéder gratuitement à une version online sur le site marugoto-online. Cette version reprend tous les points abordés dans le manuel en y ajoutant même des exercices supplémentaires (reconnaissance vocale notamment). Ainsi, si vous n’avez pas besoin d’un support papier, vous n’aurez pas à débourser un centime. Cette version online est également pratique si vous souhaitez d’abord découvrir leur méthodologie avant d’acheter le manuel papier.
Ceci étant dit, je vais maintenant tenter de vous décrire en détail Marugoto Starter A1. Pour ce faire, je vais dans un premier temps m’attarder sur la description que les auteurs en font puis nous verrons comment s’organisent les leçons et enfin je discuterai de la méthodologie employée.
1) Description de Marugoto starter A1 par ses auteurs
La première page des manuels Rikai et Katsudô est identique puisqu’elle présente la méthode dans son ensemble. Il est ainsi précisé que l’objectif est d’atteindre le niveau A1 prôné par la Fondation du Japon (JF Standard, 2010) qui s’inspire directement du CECR. Il est intéressant de noter que seules les compétences orales sont citées (compréhension et expression).
Ceci n’est pas un hasard puisque ce premier manuel “starter” est très axé sur l’oral. Bien que les kana y soient présentés au début puis utilisés, ils seront soit accompagnés de rômaji, soit de la traduction anglaise tout le long des deux ouvrages (sauf dans les dernières leçons du manuel Rikai où les rômaji sont moins présents). Cela implique que même si vous ne savez pas lire le japonais, vous pouvez tout de même suivre. J’y reviendrai 😉
Ainsi, on attendra de vous à la fin que vous sachiez vous présenter ou encore que vous soyez en mesure d’utiliser les expressions de la vie quotidienne tout en étant capable de comprendre quelqu’un qui parlerait lentement en employant des mots simples. Rien de nouveau à l’horizon !
En dehors de ces objectifs langagiers, les auteurs mentionnent que Marugoto traite aussi l’aspect culturel. Cela se verrait à travers les diverses illustrations (dessins ou photos) et des conversations. C’est franchement très léger puisque ce n’est pas accompagné d’explications comme dans Parlons Japonais A1 par exemple. Bon, on va directement rentrer dans le vif de sujet avec la description d’une leçon type !
2) Structure des leçons dans Marugoto starter A1
Comme chacun des manuels de Marugoto A1 propose une structure des leçons différentes, je vais en faire une présentation séparée. La chose qu’ils partagent tous les deux est qu’ils sont divisés en 9 thèmes (moi, la nourriture, la vie quotidienne, la famille…) eux-mêmes divisés en deux leçons, soit 18 leçons au total. Je commence par le plus volumineux des deux manuels, à savoir le Rikai.
A) leçon type du manuel Rikai (compréhension)
Durant la première partie de la leçon intitulée もじとことば (moji to kotoba “lettres et mots”), on vous présente les mots utilisés via des illustrations et sous la forme d’exercices interactifs. C’est la plupart du temps de la compréhension orale avec un support écrit pour vous aider.
La seconde partie intitulée かいわとぶんぽう (kaiwa to bunpô “conversation et grammaire”) propose comme son nom l’indique de vous faire écouter des conversations puis de vous faire pratiquer la grammaire. Il s’agit beaucoup de textes à trou ou bien de cocher la bonne réponse, il n’y a jamais de traduction par exemple. Il y a beaucoup d’exercices mais ça reste assez répétitif.
Enfin, la leçon se termine sur une partie どっかい (dokkai “compréhension écrite”) où vous aurez aussi à cocher des cases puis une partie さくぶん (sakubun “expression écrite”) toutes les deux leçons. Dans celle-ci, on vous proposera de vous présenter, d’écrire un mail sur votre maison, de décrire ce que vous faites chaque jour… Reste plus qu’à trouver un correcteur après si vous êtes en autodidacte ! :p
B) leçon type du manuel Katsudoo (activités)
Les leçons du manuel Katsudoo sont plus difficiles à décrire car elles sont assez bordéliques (désolé du mot !). Il s’agit en effet d’une succession d’activités où on vous invite à écouter des fichiers audio en vous référant aux illustrations, à répéter et parfois à faire la conversation avec votre voisin. Il suffit de se référer aux pictogrammes (bouche, oreille et persos qui discutent) pour savoir de quoi il retourne.
Déjà, on peut dire d’emblée que ça sera compliqué si vous êtes un autodidacte puisqu’il est régulièrement demandé de faire la conversation. Autrement, durant tout l’ouvrage, vous n’aurez pour ainsi dire que des cases à cocher ou à remplir d’une lettre. On voit vraiment une volonté ici de vous faire pratiquer activement la compréhension et l’expression orale.
Pour finir, vous trouverez pour conclure chaque thème une page intitulée “Life And Culture” dans laquelle on vous présente des photos du Japon avec une ou plusieurs questions pour vous du style “comment vous utilisez les pièces dans votre maison ?”. C’est très léger puisqu’il n’y a aucune description ni tentative d’explications.
Je vais maintenant tenter de vous décrire les points forts et faiblesses de la méthode Marugoto.
3) Que penser de la méthode Marugoto A1 ?
Outre le fait qu’elle ne soit pas destinée à un public francophone ni d’une autre langue en particulier (c’est mieux si vous comprenez l’anglais cela dit), cette méthode a retenu mon attention sur plusieurs points. Je vais les lister un par un pour que ce soit clair.
L’absence d’explications et de tout métalangage
Que ce soit pour le manuel Rikai ou Katsudoo, vous n’aurez droit à aucune explication que ce soit d’ordre grammatical ou autre. Enfin, si, on vous décrit quand même comment utiliser chaque manuel dans l’introduction ! 😀
Pour vous donner un exemple parlant, les deux premières leçons du Rikai sont sur les hiraganas et les katakanas. Eh bien il ne vous est pas indiqué quand on doit utiliser tel ou tel syllabaire, c’est à vous de deviner. Ou alors on compte sur vous pour apprendre par cœur la graphie de chaque mot sans vous poser de questions. C’est assez perturbant quand on sait qu’un même mot peut avoir plusieurs graphies différentes en japonais.
J’imagine que ce choix est volontaire afin de vous inciter à imiter et pratiquer l’oral plutôt qu’à réfléchir sur le pourquoi du comment. Toutefois pour un autodidacte, ça me semble nécessaire d’avoir un peu de théorie à côté pour compléter. Ici, on ne vous demandera que de faire comme dans les exemples.
Des exercices en veux-tu en voilà !
Afin de pallier à cette absence de toute explication grammaticale, Marugoto starter A1 compense avec une progression basée sur un enchaînement d’exercices sans interruption. Chaque document est exploité et même quand on vous donne une petite liste de mots en début de leçon, ce sera à vous de les relier aux photos ou dessins en vous aidant d’une piste audio notamment.
C’est d’ailleurs difficile à suivre pour un débutant sans écouter l’audio associé à l’activité et cela me donne l’impression que la méthode Marugoto a d’abord été pensée pour un support numérique. C’est en tout cas bien plus fluide sur écran et devoir chercher chaque piste audio quand on veut absolument travailler sur papier peut s’avérer laborieux.
Concernant leur variété, c’est plutôt convaincant avec des phrases à trou ou à remettre dans l’ordre, beaucoup d’associations, de la reconnaissance vocale (écrire en hiragana ce qu’on a entendu) sans oublier les expressions écrites plus libres.
Enfin, à la fin de chaque leçon (manuel Katsudoo), on vous proposera une conversation résumant les points étudiés puis d’aller remplir le tableau “can-do” (savoir-faire). Celui-ci vous permettra de contempler votre progression au fur et à mesure. Il y a deux tests (un au milieu et un à la fin) mais c’est vraiment fait pour une classe de langue. En gros, les auteurs suggèrent des exemples d’exercices à effectuer et une procédure à mettre en œuvre. Pas pour les autodidactes encore une fois donc !
La place des rômaji
Comme la méthode Marugoto est principalement axée sur la compréhension et l’expression orale, il est plutôt logique de trouver des rômaji qui vous indiqueront la prononciation des mots sans que vous n’ayez à faire d’effort.
Mais ce qui m’a paru bizarre, c’est le fait de ne les retirer que partiellement à partir du thème 6 du manuel Rikai (dans le Katsudoo, ils sont présents tout du long). Ainsi, on ne les laisse que pour les conversations et… la compréhension écrite (dokkai).
Or selon moi, c’est justement pour la compréhension écrite qu’il aurait fallu les enlever ! C’est quand même plus gratifiant de comprendre un texte en japonais plutôt que des petits mots par-ci par-là. Non ? Rien ne vous empêche cela dit de les cacher car ils sont en général placés sur le côté (bonne chose).
Je précise au passage que les kanjis sont introduits petit à petit à partir de la leçon 5. On vous demandera juste de savoir les reconnaître et les prononcer sans distinction entre les lectures kun/on. Le strict minimum donc !
Une langue relativement naturelle mais qui manque de variété
J’ai eu beaucoup de mal à trouver les mots pour décrire les dialogues de ce Marugoto A1. Car vu que le manuel est axé sur l’oral, ça se sent et les conversations sont plutôt naturelles avec des tournures oralisées (じゃない janai à la place de ではありません deha arimasen par exemple).
Ainsi, la seule fois où vous trouverez le fameux あなた (anata), c’est dans les énoncés quand on demande votre avis (ce qui est habituel à l’écrit). Dans les dialogues, les personnages s’appellent soit par leur prénom soit par rien du tout (les pronoms personnels étant facultatifs en japonais).
Toutefois, que ce soit pour les conversations plus longues ou la partie compréhension écrite, il n’y a quasiment aucune variété. C’est-à-dire qu’on vous rabâche sans cesse les mêmes mots et formules présentés en début de leçon sans dévier d’un iota.
Ce qui fait qu’à la fin, vu que les persos ne sont limités qu’à certains mots et expressions, les discours apparaissent souvent peu authentiques. Les personnages peuvent faire penser à des robots et cette vidéo de Marugoto Plus est assez parlante. Je peux donc comprendre que ces répétitions puissent provoquer l’ennui (ce qu’on m’a rapporté). En comparaison, Parlons japonais A1 propose bien plus de tournures même si c’est moins abordable en contrepartie. On ne peut pas tout avoir !
Conclusion
Que retenir de cette critique alors ? D’une part, je trouve la méthode Marugoto Starter A1 intéressante si vous souhaitez vous améliorer à l’oral (compréhension et expression). Vous aurez l’occasion de vous entraîner via les nombreuses activités réparties dans des thèmes cohérents par rapport au niveau visé. En étant immergé dans un milieu japonophone, il vous sera possible de pratiquer assez vite en théorie.
Les manuels (Rikai comme Katsudoo) sont plutôt bien présentés et faciles à parcourir si on prend la peine de bien imiter sans se poser de question. J’ajouterais également que le japonais utilisé est plutôt naturel, on est à des années-lumière de celui dans 40 leçons pour parler japonais qui est trop “grammatical”. Et si l’anglais vous fait peur, le site propose un livret de vocabulaire en français.
Toutefois, si vous êtes quelqu’un qui aime bien avoir des explications même minimales que ce soit sur la grammaire ou le vocabulaire, il se peut que vous soyez frustré. Je ne crois pas personnellement que j’aurais pu suivre ce genre de méthode en étant débutant, ou alors je l’aurais couplé avec un manuel de grammaire.
Il est difficile aussi de recommander Marugoto à un autodidacte puisqu’en plus de l’absence d’explications, beaucoup d’exercices sont faits pour être réalisés en binôme en classe. Pareil pour les tests même si apparemment, il y en a de prévus pour autodidactes sur la version online. Mais comme cette critique concerne les manuels papier, eh bien… 😉
Points positifs :
- japonais utilisé plutôt cohérent pour un usage à l’oral bien que ça manque de variété
- manuel bien illustré avec une progression dynamique sous forme d’activités qui s’enchaînent
- possibilité d’avoir du contenu supplémentaire gratuitement via Matugoto Plus
- Exercices variés (surtout dans le Rikai)
- version online totalement gratuite
Points négatifs :
- absence totale d’explications, que ce soit grammaticales, lexicales ou culturelles
- partie culturelle en retrait avec une pauvre page sans description toutes les deux leçons
- méthode écrite prévue pour la classe et difficile à conseiller à un autodidacte
- conversations souvent peu authentiques et pas assez vivantes
- côté répétitif pouvant provoquer l’ennui (même si cela reste subjectif)