Le japonais dans tous les sens

Uso (嘘) : c’est un mensonge ou simplement une erreur ?

Le mensonge qui a une connotation plutôt négative n’est en soit ni bon ni mauvais. Tout dépend l’intention derrière et comme le dit un proverbe oriental “mieux vaut un mensonge qui procure la paix qu’une vérité qui déclenche la guerre” (Maximes et sentences orientales, 1784). On va donc s’intéresser aujourd’hui au mot uso (嘘) et ce à qu’il signifie dans la société japonaise.

Étymologie du mot uso et usage aujourd’hui

Uso s’écrit avec le kanji 嘘 que l’on peut décomposer en deux parties : 口 “la bouche” (kuchi) et 虚 “vide/contre-vérité”. Il existe plusieurs hypothèses quant à son étymologie et je vais citer ici la plus vraisemblable. Il s’agit du verbe ancien usobuku (嘯く) qui signifiait à l’origine siffloter en imitant les bruits des animaux et de la nature ou encore fanfaronner. Par ailleurs, on le retrouvait aussi avec le sens de “chanter seul des incantations en direction d’un monde invisible (spirituel)“. Et petit à petit, cet acte aurait été interprété comme une pure invention visant à tromper (= mensonge) d’où serait dérivé uso.

Le Pinocchio japonais, j’ai nommé Usopp (One Piece).

Quoi qu’il en soit, il est utile de retenir la partie gauche 口 car 嘘 désigne un mensonge sortant de la bouche. J’insiste là dessus car il existe le synonyme itsuwari (偽り) plus ancien qui renvoie aussi aux actes/comportement. Par ailleurs, il arrive fréquemment que uso soit employé seul dans une conversation. Il indique la plupart du temps la surprise du locuteur face à quelque chose qu’il pense invraisemblable. Uso ! (嘘 !) “c’est pas vrai ! /tu rigoles ??“. On retrouve d’ailleurs ce sens de “faux” dans le mot usoji (嘘字) qui signifie “un caractère erroné/qui n’existe pas”.

Sur le Wikipedia japonais, il y a un petit passage indiquant qu’au Japon, on évite en général de blaguer autour des mensonges. C’est à dire une situation où deux personnes inventent mutuellement des fadaises dans le seul but de se divertir (et de rêver un peu aussi). C’est plutôt vrai étant donné qu’on s’abstient de dire des choses pouvant être mal interprétées. On mentirait donc davantage pour conserver de bonnes relations (comme partout ailleurs). “Je ne veux pas te voir” devient ainsi “je suis occupé/fatigué”. Et puis comme le dit le proverbe bouddhique uso mo hôben (嘘も方便 où 方便 est un moyen pour atteindre l’éveil), ce n’est pas bien de mentir mais c’est parfois nécessaire ! 🙂

Sources : ja.wikipedia (étymologie et généralités)

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3 commentaires

  1. Je pense que le mensonge fait partie intégrante de la culture japonaise, ne serait-ce que par le concept du “tatemae” qui nécessite parfois de recourir à un mensonge pour éviter de dire ce que l’on pense afin de ne pas blesser l’autre personne. Je dois avouer que le concept du “tatemae” et des mensonges (ou en tout cas sortes de faux compliments) m’a été difficile à accepter quand j’ai commencé à vivre au Japon. J’associais généralement les japonais à des menteurs alors que culturellement, c’est un peu plus complexe que cela ˆˆ

    1. En fait plus que les mensonges, moi je pense que ce sont surtout les non-dits qui ressortent. Donc on dit souvent une partie de la vérité mais pas tout. Enfin c’est vrai que c’est comme des mensonges du coup vu qu’on déguise la réalité. Après les mensonges existent évidemment dans la culture française (sinon on ne pourrait pas vivre en société) mais c’est vrai qu’au Japon, les faux compliments davantage visibles par leur caractère automatique. Je pense que tout étranger s’est fait dire “nihongo ga jôzu desu ne” (日本語が上手ですね “vous parlez bien japonais”) et à 90% du temps, c’est du tatemae. Mais il n’y a jamais de mauvaises intentions derrière (comme flatter l’autre pour obtenir des faveurs), juste qu’on le dit par convention. C’est vraiment ce que j’ai ressenti en travaillant à l’hôtel, j’avais vraiment l’impression qu’il y avait une formule de politesse prévue pour telle ou telle situation. Comme si on avait un tableau dans la tête en somme. Il me semble qu’on varie davantage en français mais c’est à vérifier.

      Après pour l’anecdote, il parait que pour les espagnols, on est “trop” poli. En France (et au Japon aussi), on a l’habitude de dire “merci” pour n’importe quoi. Par exemple quand on demande le pain à son voisin. Et bien en espagnol, on dit “gracias” beaucoup moins fréquemment, presque uniquement lorsqu’on est “vraiment” reconnaissant. Et une espagnol qui a passé plusieurs années en France s’est fait reprocher ça par sa famille. Du coup, on pourrait penser que pour les espagnols, on est des “menteurs” en France sur ce point vu qu’on remercie trop ! 😀

      Si jamais vous avez du temps, je vous recommande de regarder cette conférence de 3h00 sur l’interculturalité, c’est vraiment passionnant : https://www.youtube.com/watch?v=FPqdKaK9VbI 🙂

  2. Effectivement, la part des non-dits est assez importante. Et comme vous l’avez mentionné, je pense que presque tous les étrangers se rendant au Japon entendent au moins une fois le fameux ” 日本語が上手ですね ” ! C’est d’ailleurs une des phrases les plus représentatives du fameux 建前 selon moi, tout simplement parce que l’on peut l’entendre après avoir simplement tenté un “konnichiwa” et un “arigatou gozaimasu”. Cela rend le compliment clairement exagéré qui relève bien sûr d’un automatisme. J’ai toujours trouvé ça un peu frustrant quand on apprend sérieusement le japonais, tout simplement parce que je préfèrerais “mériter” ce compliment sans qu’il soit donné indépendamment de notre niveau réel (qui est bien sûr indiscernable par un “bonjour” et “merci” 😀 )

    Je suppose en effet que l’hôtellerie est un très bon exemple de réponses automatiques prédéterminées pour chaque situation possible. Et il est parfois possible de sentir un vent de panique lorsqu’une requête d’un client non indiquée dans le manuel fait son apparition ˆˆ

    Je vous remercie pour le lien, je vais jeter un oeil à cette conférence !

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