J’espère que vous êtes bien réveillés aujourd’hui car on va parler d’un concept lié au sommeil. Celui-ci est désormais bien connu des étrangers, notamment ceux empruntant le métro japonais chaque matin. Il s’agit du inemuri (居眠り) traduit souvent par “assoupissement/somnolence”. Qu’est ce qui le caractérise ?
Définition du mot inemuri et état des lieux au Japon
Inemuri s’écrit en japonais 居眠り où 居 signifie “se trouver/être présent” et 眠り “sommeil/fait de dormir”. On peut donc l’interpréter de la manière suivante : être présent mais dormant. Vous me direz, quand on dort, on est forcément présent quelque part. Mais ici, il s’agit uniquement de situations où on n’est pas censé dormir ou somnoler. Par exemple, en classe ou dans le métro. Le fait de somnoler tout en conduisant se dit d’ailleurs inemuri unten (居眠り運転).
Jusque là, on peine à y voir un concept spécifique au Japon. Qui n’a pas déjà somnolé en cours de maths ? Il faut plutôt y voir une différence de degré : au pays du soleil levant, cela se fait beaucoup plus fréquemment et c’est davantage toléré par la société. Si vous prenez un train le matin vers 8h00, vous verrez probablement des rangées de japonais endormis. Il n’est pas rare non plus que cela se fasse directement au bureau pendant les heures de boulot. Ce n’est pas forcément encouragé évidemment mais il y a un certain laisser faire.
Plusieurs études ont été réalisées auprès de lycéens japonais, chinois, coréens et américains sur le sujet. Elles semblent indiquer à chaque fois que le phénomène est beaucoup plus important au Japon. Dans la dernière réalisée en début 2017, 15% des lycéens japonais interrogés affirment dormir en cours contre 8,4% de coréens, 3,8% d’américains et 3,3% de chinois. On va maintenant discuter des raisons possibles à ce constat.
Comment expliquer une telle ampleur pour les inemuri ?
On va commencer par les lycéens : les principales raisons mises en avant par ceux-ci sont la nullité du cours (jugyô ga tsumaranai 授業がつまらない), la fatigue, le ton monotone du professeur… Des arguments que l’on pourrait retrouver partout ailleurs. Il semble que la source du problème vienne des conditions de travail des professeurs japonais. Parmi les pays de l’OCDE, ils sont ceux qui passent le plus de temps dans leur établissement (53,9 heures en moyenne). Et ce sont les tâches administratives et la participation à des clubs culturelles qui semblent leur prendre beaucoup de temps.
Je rajouterai qu’il y a également un cercle vicieux où la pratique du inemuri s’est banalisé au Japon. Si tout le monde le fait dans le métro, pourquoi on le ferait pas en cours ? A propos du phénomène dans transports en commun, on trouve toute sorte d’interprétations. Celle qui vient naturellement est “c’est parce que les japonais travaillent trop !”. Même si ce paramètre joue, c’est surtout parce qu’il est praticable que le inemuri existe. Il serait probablement plus présent en France si la crainte de se faire enquiquiner était moins palpable.
Et au boulot alors ? On trouve cette fois-ci une hypothèse surprenante. Si certains employés piquent un somme durant les heures de travail, c’est pour… bien se faire voir ! Et oui, ils indiquent à leur supérieur qu’ils travaillent jusqu’à la limite de leur capacité au point de s’endormir sur leur lieu de travail. Attention cela dit si vous voulez vous lancer, il existe une règle obligatoire : interdit de s’allonger, il faut le faire assis ! 😀
Sources : matome.naver (résumé d’études et avis de japonais), picsim-blog.com (étude réalisée en 2017)